Bahá'í Library Online
. . . .
.
>>   Provisional translations
TAGS: Risaliy-i-Siyasiyyih (Treatise on Leadership)
> add tags
Abstract:
Translation into French from Persian by Dreyfus.
Notes:
See also the original Persian text (offsite) and an English translation.
Language: French.

La Politique:
Treatise on Leadership

by Abdu'l-Bahá

translated by Hippolyte Dreyfus
n.d. []
originally written as "Risáliy-i-Síyásíyyih" in Persian.
date of original: 1893

1

Il est Dieu!

Gloire et louange dignes du Dieu pur qui a étayé la création sur l'apparition des saintes vertus de l'homme, afin que la divinité invisible devienne évidente dans la plaine du témoignage par les conditions, les signes, les ordres, les actions, le visible et l'invisible; et afin qu'éclate de l'aurore du matin apparaissant la lumineuse vérité de "J'étais un trésor caché, et Je voulais être connu."

Et la grâce et les louanges sont dues à la parfaite individualité de l'Être glorieux,[i] soleil de vérité du monde divin, et sublime lumière du monde humain, centre des bienfaits de Dieu, et aurore des signes évidents de l'Éternel, par l'apparition de qui s'est réalisé dans le monde sensible le mystère de "J'ai créé la création afin d'être connu." "Et tu vois la terre stérile: lorsque Nous avons répandu l'eau sur elle, elle a vibré, produit, et fait croître les rejetons de chaque couple joyeux."

2

En ces jours et ces moments, comme certains évènements,[ii] contraires à toutes les religions, destructifs de la race humaine et des principes divins, se sont produits du fait de gens ignorants et dénués de bon sens, fomentateurs d'agitations et de séditions, qui, prenant pour prétexte la Religion évidente de Dieu, et faisant naître des clameurs et des tumultes, ont déshonoré le peuple de Perse devant les nations du monde, étrangères ou alliées (ô grand Dieu! Ils prétendent être des bergers et ils ont les moeurs des loups; ils lisent le Qoran et ils suivent les usages des bêtes fauves; ils ont face humaine et ils approuvent la conduite des animaux! "Lorsqu'on leur dit ne semez pas le désordre sur la terre, ils répondent: En vérité nous sommes des gens pacifiques; tandis qu'en vérité ils sont des agitateurs, mais ils ne le savent pas"), il est devenu nécessaire qu'un sommaire des bases essentielles des préceptes divins soit publié, afin de rendre les amis prudents et attentifs.

3

Il est clair et évident que de par sa nature et sa constitution, tout être vivant contient deux sortes de qualités: des qualités naturelles, qui, sans aucun intermédiaire, ne sont le fait que de la création divine; et les qualités acquises qui viennent de l'éducation du Maître de Vérité. Considérez également d'autres objets: les arbres, les fleurs, les fruits ont une fraîcheur et une élégance naturelles qui sont uniquement dues à la générosité divine, et aussi un éclat et une douceur ineffable dus aux bons soins du jardinier. En effet, si on les laissait à eux mêmes, ils deviendraient broussailles et fourrés; les fleurs et les bourgeons ne pousseraient pas et ne produiraient rien, et ils ne seraient bons qu'à brûler. Mais lorsqu'ils reçoivent les soins et la culture de l'éducateur, ils deviennent des jardins et des parterres de roses, des prairies et des vergers; les bourgeons et les fruits poussent, et la surface de la terre est parée de fleurs et d'herbes odorantes. De même pour la société humaine et l'aspect général du monde civilisé: si on laisse les hommes à leur état naturel, ils deviendront comme des bêtes rampantes, ils seront comptés parmi les animaux et les fauves, ils seront cruels, rapaces, avides de sang, ils seront brûlés par le feu des exclus et des impies.

4

L'espèce humaine peut être comparée à des enfants allant à l'école du monde, et que des maladies invétérées auraient rendus faibles et impuissants. Les Êtres bénis (les prophètes et les élus) sont les divins maîtres de la société, et les médecins de l'hôpital de Dieu. Ils ont les messagers de la Providence, les soleils de l'atmosphère éthérée de la Direction; c'est par eux que la flamme lumineuse des perfections cachées, les images effacées et éteintes sous le globe de la lampe humaine, sont rallumées au feu divin; grâce à eux les maladies invétérées sont détruites par la faveur de la Providence et par l'esprit évangélique.

Ainsi, de cet argument glorieux, il résulte clairement que l'éducation et la providence d'un divin Maître[iii] sont nécessaires à la société humaine; et de même, chaque individu a besoin de chefs, de chaînes, de freins, de gardes, d'encouragements, de conducteurs, d'entraîneurs.[iv] Car, ce n'est que par la culture du jardinier providentiel, les bienfaits divins, et les justes soins d'un gouvernement, que le jardin de la création obtiendra l'ordre, l'élégance, l'abondance, et la bénédiction.

5

Ces gardes, ces freins, ces chefs, ces chaînes, ces commandants, ces conducteurs sont de deux espèces. La première espèce de protecteurs et de gardes, est l'autorité gouvernementale qui appartient à l'ordre matériel, et est la cause de la prospérité extérieure de l'humanité: c'est à elle qu'est due la protection de la vie, de la fortune et de l'honneur des citoyens, et la grandeur et la noblesse des vertus sociales de la glorieuse race humaine. Le siège des réformes et des abrogations de cette autorité gouvernementale, le centre de ce cercle des faveurs divines, ce sont des souverains justes, des confidents parfaits, des ministres intelligents, des généraux courageux.

6

La deuxième sorte de Maîtres et de gardes qu'a l'humanité, c'est la sainte autorité spirituelle, les livres célestes révélés, les prophètes de Dieu, les âmes des élus et les docteurs divins. Car les Lieux de descente de la Révélation et d'apparition de l'Inspiration sont les éducateurs du coeur et de l'esprit des hommes, les directeurs de la morale, les purificateurs du caractère, et les entraîneurs des gens pieux. C'est-à-dire que des êtres sacrés, comme des puissances spirituelles sauvant les âmes humaines des conséquences funestes de la bassesse, de la noirceur des turpitudes innées et des souillures de ce monde, éclairent l'esprit des hommes par les lumières des vertus transcendantes, des conditions célestes, des moeurs et des qualités angéliques; ainsi la brillante réalité de "Béni soit Dieu le meilleur des Créateurs", et la vertu de "En vérité nous avons créé l'homme dans la forme la meilleure", sont manifestées dans la personnalité sacrée de l'homme. C'est ainsi que par la glorieuse abondance de l'Aurore des signes divins, la pure et douce essence de l'homme devient le centre des conceptions sacrées du Miséricordieux. Ce rôle sacré a son fondement dans l'ordre des choses spirituelles et divines et dans l'essence de la réalité; il n'a aucune relation avec les conditions matérielles, les affaires politiques, ni les choses mondaines: au contraire les célestes pouvoirs de ces âmes parfaites et pures pénètrent dans la réalité de l'âme, dans l'essence de l'esprit et du coeur, et non dans l'eau et la boue.[v] Les drapeaux des signes de ces Essences du détachement sont élevés dans l'atmosphère vivifiante de la spiritualité, non dans ce monde poussière: elles n'ont et n'auront aucun rapport avec les affaires de l'État ou des sujets, des souverains ou des peuples: elles appartiennent uniquement aux célestes brises divines! Elles sont associées aux secrètes bontés éternelles, et ne cherchent à se mêler à aucune autre affaire. Elles ne conduisent pas le coursier de leurs efforts dans l'arène des calomnies et des vains pouvoirs: car s'il y a pour les affaires politiques, gouvernementales, administratives ou populaires, une base respectée et une source établie, de même pour la Direction, la Religion, la Connaissance de Dieu, l'éducation et l'établissement des qualités et des vertus humaines, il existe un centre sacré et une source définie. Ces êtres n'ont aucun rapport avec les affaires politiques, et ne cherchent pas à s'y intéresser.

Ainsi, dans cette époque sublime où le monde est arrivé à l'âge de raison et de puberté, cette question est révélée dans le Livre divin, comme un fondement inébranlable. Il résulte de cette révélation décisive et de cet argument évident que chacun doit se soumettre et s'incliner devant les ordres du gouvernement, et se considérer lié et obéissant aux pieds du trône de l'empire: en d'autres termes, par notre obéissance et notre servitude envers les souverains, nous devons nous montrer des sujets fidèles et des serviteurs dévoués. Ainsi il en est ordonné dans le Livre éternel et immortel du Pacte, des Serments et des Traités[vi] de la Beauté de Dieu, dont le commandement est décisif, l'aurore brillante, le matin glorieux et splendide. Tel est le commandement révélé:

7

"Ô élus et fidèles de Dieu,[vii] les Rois sont les Manifestations du Pouvoir et les Apparitions de la Gloire et de la Richesse de Dieu, Priez pour eux! Les gouvernements de la terre leur ont été donnés par Dieu, qui a gardé pour Lui les coeurs. Il a interdit les controverses et les discussions, Sublime interdiction du Livre! Tel est l'ordre de Dieu dans cette très glorieuse Manifestation, qu'Il a préservé du commandement de l'abrogation, et qu'Il a orné de la parure de la stabilité. En vérité Il est le Savant, le Sage! Chacun doit prêter assistance aux manifestations de l'ordre et aux apparitions du commandement, revêtues de la parure de la justice et de l'équité."[viii]

8

Et de même dans une claire Épître à l'un des Oulémâ, Il dit:[ix] et voici un extrait de cette Épître sacrée:

9

"À présent, il faut que S. M. le Sultan[x] que Dieu Très Haut le protège! traite ce peuple[xi] avec miséricorde et tendresse. Et cet opprimé promet devant la Kaba de Dieu que de ce peuple n'apparaîtront que sincérité et fidélité, et rien de contraire aux désirs exaltés de Sa Majesté. Chaque peuple doit respecter la station de son souverain, s'incliner devant lui, exécuter ses ordres, et se baser sur ses commandements. Les souverains ont été et sont les Manifestations du Pouvoir, de la Grandeur et de la Gloire de Dieu. Cet opprimé n'a jamais agis hypocritement avec qui que ce soit: tout le monde en témoignerait et le prouverait; d'ailleurs le respect pour la Station des Souverains vient de Dieu, comme on le voit clairement dans les paroles des prophètes et des élus.

Un jour quelqu'un dit au Christ (sur lui le salut!): "Ô Christ, est-il permis de payer le tribut à César, ou non? Il répondit: oui; rendez à César ce qui appartient à César, et à Dieu ce qui appartient à Dieu." Il ne l'a pas interdit; et entre ces deux propositions les sages ne voient pas de différence, car si ce qui appartient à César ne venait pas de Dieu, il l'aurait interdit.

De même dans le verset béni "Obéissez à Dieu, au Prophète et à votre souverain." Souverain, en premier lieu, a signifié et signifie les Imams (sur eux la bénédiction de Dieu!). Ils sont les manifestations du Pouvoir, les sources des Commandements, les trésors de la Science, et les apparitions des Ordres divins. En second lieu, les rois et les sultans, ou, tout au moins, ceux dont la justice illumine et fait briller les horizons du monde. Espérons que, de S. M. le Sultan, apparaîtra une telle lumière de justice, qu'elle enveloppera tous les peuples du monde. Chacun de nous doit demander à Dieu, pour lui, ce qui convient en ce jour.

Mon Dieu, mon Dieu! mon Seigneur, mon Soutien, mon Désir et mon Bien-Aimé! Je Te demande, par les mystères qui étaient cachés dans ta Sagesse, par les versets qui ont répandu les parfums de ta Providence, par les vagues de la mer de ta Bonté, par le ciel de ta Faveur et de ta Générosité, par le sang versé dans ton Chemin, par les foies brûlés par ton Amour, d'assister S. M. le Sultan, de ton Pouvoir et de ta Souveraineté; afin qu'apparaisse de lui ce qui sera inscrit à jamais dans tes Livres, tes Pages et tes Tablettes! Ô mon Seigneur, prends sa main dans ta Main puissante, illumine-le par la lumière de ta Connaissance, orne-le de la parure de tes Vertus. En vérité Tu es celui qui a le pouvoir sur ce qu'il veut, et en ta possession sont les rênes de toutes choses! Il n'y a d'autre Dieu que Toi, le Pardonneur, le Généreux!-

St Paul, dans l'Epître aux Romains a écrit: "Que toute personne soit soumise aux souverains, car il n'y a point de souverain qui ne vienne de Dieu, et les souverains qui existent ont été établis par Dieu. C'est pourquoi celui qui s'oppose au souverain s'oppose à l'ordre de Dieu."[xii] Puis il dit: "Car il est ministre de Dieu et vengeur pour punir celui qui fait mal."[xiii] En d'autres termes, l'apparition des souverains, leur pouvoir et leur puissance, viennent de Dieu.

Dans les Hadiss anciens, il est écrit ce que les Oulémas on vu et entendu. "Nous demandons à Dieu, le Béni, l'Exalté de t'assister, Ô Scheykh, pour comprendre ce qui est révélé du Ciel de la bonté de Dieu, le Seigneur du Monde."

10

Alors, ô amis de Dieu, efforcez-vous de tout votre coeur, de prouver votre loyauté,[xiv] en souhaitant le bien au gouvernement, et en lui obéissant sans arrière pensée et avec bonne volonté. De toutes les obligations religieuse, et de tous les textes décisifs du Libre Sublime, c'est le commandement le plus important! Il est évident que le gouvernement recherche naturellement le repos et la tranquillité de ses sujets, travaille à la fortune et au bonheur du peuple, s'efforce de protéger les justes droits de sa suite et de ses serviteurs, veille et est attentif pour réprimer l'iniquité des oppresseurs. Car la gloire et la richesse des sujets constituent la puissance, la grandeur et la force d'une souveraineté reconnue et d'un gouvernement victorieux. Le succès et le salut des peuples est l'objectif de la Majesté des souverains; et c'est chose bien naturelle! Et si l'on constate une lacune dans le repos des peuples, ou une diminution de la fortune et du bonheur des grands ou des petits, c'est un signe de l'incapacité des fonctionnaires, ou de l'excès de la tyrannie et de l'ignorance de malfaiteurs, revêtus des vêtements de la Sagesse, et passés maîtres en malhonnêteté: depuis l'origine jusqu'à la fin du monde, ils demeurent les fomentateurs de désordres. "Le désordre était endormi; que Dieu maudisse celui qui l'a réveillé!"

11

Voici cinquante ans que cette troupe ignorante (les prêtres) sur la place publique et du haut des chaires, dans les assemblées et les réunions, en présence des gouvernants, accusent faussement ce peuple opprimé[xv] de causer des troubles, et le laissent taxer de criminel: ils disent qu'il est le perturbateur du monde, le corrupteur des moeurs humaines, l'agitateur des peuples, un ramassis d'êtres néfastes, le drapeau de la rébellion, la bannière de l'impiété, l'adversaire de la Religion et de l'État, l'ennemi de la vie des sujets.- Il importait à la justice divine que le caractère de chaque peuple et de chaque secte apparût clairement, afin que, dans l'assemblée du monde, on sache distinguer infailliblement les pacifiques des agitateurs, reconnaître à quelle nation appartiennent les fomentateurs de discorde, et à quelle secte les perturbateurs. "Et Dieu sait distinguer les agitateurs des pacifiques."

"Qu'il serait bon que la pierre de touche de la preuve fût trouvée, afin que noircisse de honte le visage de celui qui est impur."

Maintenant, ô divins amis, occupez-vous à rendre grâces à la Providence divine, de ce que le Vrai Juste a dévoilé les actes de chaque peuple et, comme un astre brillant, a rendu clairs et évidents les mystères cachés dans les coeurs. Grâce à Lui, de nouveau grâce à Lui!

12

Donc, les droits des Oulémâ et les devoirs des docteurs, consistent à s'occuper des affaires spirituelles et à répandre les qualité divines. Et chaque fois que les Oulémâ de la religion, et les soutiens des lois divines sont intervenus dans la politique, ont donné un conseil, ont pris une délibération, ils ont été la cause de la dispersion et de la destruction de l'assemblée des croyants: le foyer de la discorde a été allumé, le feu de la haine a brûlé le monde, le pays a été dévasté et ruiné, les sujets ont été emmenés, captifs et en chaînes, par les ennemis.

Aux temps des derniers rois Sofaviyés[xvi] (sur eux la miséricorde du Roi de l'univers!) les Oulémâ cherchèrent à influencer la politique de la Perse: ils se mirent en révolte, firent des plans, montrèrent un nouveau chemin, ouvrirent une porte. Le funeste résultat de tout cela fut la ruine et la destruction. Les provinces préservées devinrent une lice ouverte aux tribus des Tur Komans, une place réservée au pillage et à la domination des Afghans. La terre sacrée de Perse fut soumise aux nations voisines, et les glorieuses contrées tombèrent aux mains des étrangers. Les hommes injustes ouvrirent la main de la tyrannie, et les malfaiteurs s'en prirent aux propriétés, à l'honneur et à la vie! Combien de gens furent tués et de propriétés volées! Les grands, qu'on se mit à haïr, se virent privés de leurs biens. La Perse si cultivée devint un lieu désolé: la souveraineté fut la demeure et la résidence des démons, les rênes de l'État passèrent aux mains des barbares, et la famille royale tomba sous la chaîne et l'épée des tyrans sanguinaires. Les femmes furent emmenées captives, et les enfants enchaînés! Tel fut le résultat de l'immixtion des Oulémâ de la religion et des docteurs de la Loi dans la politique!

13

Une autre fois les Oulémâ du peuple, au début du règne de S. M. Agha Mohammed Khan[xvii] se lancèrent dans les réformes politiques, et criblèrent la tête des Persans de la poussière de l'humiliation! Ils donnèrent leur avis sur les affaires de l'empire, et, troublant les pensées, ils chantèrent leur chant. Ils causèrent ainsi des disputes et des révoltes, et levèrent le drapeau de la discorde. L'ouragan de la rébellion fut déchaîné, le torrent des désordres et des troubles déborda, une énorme confusion en résulta: la vague de la désobéissance monta jusqu'au ciel. Le moindre chef de tribu leva la tête de la souveraineté; les germes de l'inimitié furent semés dans le champ du pays, et l'on se mit à s'entre-tuer. Le repos et la sécurité disparurent, les pactes et les traités furent déchirés, et en l'absence de toute tranquillité, il ne resta plus ni propriétaires ni propriétés! Jusqu'au jour où les évènements décisifs de Kirman arrivèrent;[xviii] alors la poussière des troubles et des révoltes tomba peu à peu, les dernières bandes de malfaiteurs furent arrêtées, et la racine de l'agitation fut extirpée.

14

La troisième fois, ce fut sous le règne de l'Empereur (Feth-Ali-Chah) (paix à son âme!). Lorsque les chefs religieux,[xix] causant des troubles et des clameurs, arborèrent le funeste drapeau et déclarèrent la guerre sainte à la Russie.[xx] Ils traversèrent les routes au son des tambours et des musiques, et arrivèrent aux villes de la frontière. Lorsqu'ils parvinrent à la frontière, à la première pluie de balles, ils se sauvèrent: en plein champ de bataille, au premier coup de fusil, ils perdirent tout honneur, et choisirent la honte de la fuite. Ils se dispersèrent comme des sauterelles, ou comme des troncs minés de dattiers morts.[xxi] Sur les bords du fleuve Arax et dans les plaines désertes de Maghan[xxii] ils furent égarés et défaits: la moitié de la province de l'Azerbaïjan, sept Krours de toumans, et les rives de la mer du Mazandéran furent perdus (à la Russie).

Mais les plus graves avertissements furent encore les tristes évènements du règne de S. M. Abdul-Aziz Khan l'opprimé[xxiii] (paix à son âme!). Aux derniers jours de son règne, commençant à se révolter et levant le drapeau de la discorde, les chefs religieux des peuples ottomans déchaînèrent un mouvement de folie, et voulurent se mêler et s'associer aux importantes affaires (du gouvernement). Ils créèrent des troubles de concert avec les fonctionnaires sous prétexte de religion et de loi divine, par les vains mots de bien populaire. Ils exigèrent la démission des ministres et détruisirent les fondements de la justice et de la paix publique. Ils exilèrent les hommes de bien, à la plus grande joie des malfaiteurs, rendant les fidèles odieux au peuple, et les infidèles sympathiques. Lorsqu'ils obtinrent la satisfaction de leurs désirs, ils émirent d'autres exigences qu'ils virent porter aux pieds du Trône, et ouvrirent sur le souverain la main de la tyrannie. Ils rendirent un fetwa le détrônant, et se levèrent pour le subjuguer et l'écraser. Ils déshonorèrent la justice, faisant voler la poussière de l'iniquité. Ils donnèrent libre cours à l'oppression rendant infâme la Religion sacrée, souillant la Loi du Prophète.

Ce mouvement alluma dans le centre du monde un foyer de désespoir et de désolation, et le coeur de la terre et des habitants brûla pour le martyre de ce souverain. Puis ils s'obstinèrent à demander la guerre, habituant les hommes à la cruauté. Ils leur donnèrent des armes, et, à la fin, elle fut déclarée. Ils firent croire au peuple que la Russie était un État réduit à la dernière extrémité, que ses soldats et ses armées n'étaient que des corps sans âme, ses généraux des lâches, ses hérauts impuissants, son gouvernement sans force, son empire sans pouvoir et sans gloire. "Nous au contraire, disaient-ils, nous sommes une nation victorieuse et un peuple glorieux: nous faisons la guerre sainte, et nous détruisons le fondement de la rébellion. Nous serons célèbres dans l'univers et nous deviendrons les chefs incontestés des nations et des empire!"

Lorsque le résultat de ce mouvement apparut, et que le fruit de ces conceptions vit le jour, on s'aperçut que ce n'était que le malheur personnifié et le poison distillé! Le châtiment se fit connaître: calamité pour l'empire et le peuple; la terre fut teinte du sang des innocents, les champs de bataille, sous la masse des cadavres, devinrent horribles à voir. Tous les sujets burent la coupe de l'affliction: 300 000 hommes parmi les enfants de la nation et l'avenir de l'empire, goûtèrent le poison de la mort! Combien de monuments glorieux furent réduits en poussière! combien d'anciennes familles furent anéanties ou devinrent misérables! Des milliers de villages peuplés furent ensevelis sous les décombres, et les provinces entières bien cultivées furent dévastées! Les trésors furent dissipés, la richesse et la fortune du pays furent pillées. Un million d'hommes fut obligé de fuir sa patrie. Une foule de grands personnages, des provinces et des villes, des enfants en bas-âge et des vieillards, après la perte de ce qui fut perdu, abandonnant leur foyer, misérables et sans ressources, errèrent dans les champs et les déserts! Les Oulémâ pleins de Morgue qui prêchaient "la guerre, la guerre! hâtez-vous pour la guerre sainte!" se mirent à crier au premier choc: "qui nous protégera? où nous réfugierons-nous?" Et après une courte guerre, renonçant à la grande récompense et au glorieux salaire, ils s'enfuirent causant cette grande calamité![xxiv]

Ô grand Dieu! ceux qui sont incapables de diriger leur foyer, et de gouverner leur famille et leur maison, qui ignorent les affaires de leurs proches comme des étrangers, se mêlent des affaires importantes de l'empire et des sujets, s'entêtent dans les questions compliquées de la politique! Et lorsqu'on étudie l'histoire, on trouve à l'infini de pareils évènements, dont a cause fut l'immixtion des chefs religieux dans la politique! Ces gens pourtant ne sont que les explicateurs des lois sacrées, et non les exécuteurs. C'est-à-dire que lorsque le gouvernement, selon les commandements divins et l'essence des Lois sacrées, les consulte sur les affaires grandes ou petites, il leur appartient d'expliquer ce qu'ils comprennent des commandements de Dieu et des lois de la Religion. Autrement, ils n'ont aucune compétence dans la politique ou l'éducation des sujets, dans la direction ou le règlement des affaires importantes, dans l'organisation ou la prospérité civiles, dans la rédaction des lois ou règlements de l'État, dans les affaires étrangères ou intérieures.

De même dans tous les siècles et les cycles passés, la source de l'opposition contre les amis de Dieu, et du refus par les croyants d'obéir aux Signes divins, fut ces hommes parés des joyaux de la sagesse, et dont la piété et la crainte de Dieu avaient fui les coeurs; en apparence savants, en réalité ignorants; en parole, fidèles, dans leurs actes apostats; par leur corps dévoués, par leur coeur indifférents.

Ainsi, au temps où la brise vivifiante du Christ anima le corps du monde et où les souffles sacrés de Jésus dispensèrent l'Esprit à ce globe matériel, les Oulémâ des Israélites, comme Anne et Caïphe, ouvrirent la langue de l'opposition contre cette Essence de l'existence, cette Beauté visible, cet Esprit loué: ils se détournèrent de Lui, et le traitèrent d'infidèle! Ils cherchèrent à le faire disparaître, ils le brutalisèrent et le laissèrent maltraiter; ils tourmentèrent ses disciples, les condamnèrent aux pire tortures, donnèrent contre eux le fetwa de la mort, les expulsèrent, les emprisonnèrent, les martyrisèrent, les châtièrent, les torturèrent par les plus grands tourments, et firent couler leur sang pur!

Toutes ces oppositions, ces cruautés, ces châtiments, ces punitions, tout cela fut causé par les Oulémâ des peuples.

15

Et de même, considérez le temps du Mystère de la vie, la Beauté promise, l'Assisté de Dieu, sa Sainteté le Prophète[xxv] (sur lui le salut!): les opposants et les renégats, les obstinés et les orgueilleux parmi les Oulémâ juifs, les moines rebelles, les prêtres ignorants étaient jaloux de Lui. Ainsi, Abou-Amir-Rahèb, Kab-ebué-Achraf, Naz-ebué-Haress, Ass-ebué-Va'èl, Hoy-ebué-Akhtab, Oméyat-ebué-Halal, tous ces chefs religieux se levèrent pour maudire et injurier, frapper et tuer ce Soleil de l'orient de la prophétie! Leur rébellion contre cette Lumière de l'assemblée de l'humanité était telle qu'Il dit: "Aucun Prophète n'a été tourmenté autant que moi." Et encore ils osèrent se plaindre!

Donc vous voyez que dans chaque siècle et chaque cycle, l'injustice, les tourments, la contrainte, la cruauté violente et la tyrannie continuelle ont été causés par les Oulémâ infidèles. Et lorsque parfois le gouvernement a fait de l'opposition ou s'est montré malveillant[xxvi] ce fut toujours sur un signe, un accord, une indication, une instigation de ces êtres pleins de rébellion.

De même, si vous considérez attentivement notre temps, tous les évènements qui ont été connus, sont venus de la cruauté des Oulémâ injustes, privés de piété divine, éloignés des lois de Dieu, et brûlés de la flamme de la haine et du feu de la jalousie.

16

Au contraire, un sage au coeur pur et à l'âme pieuse est la Miséricorde divine, la Faveur de Dieu. Il est la Lumière de la Direction et la Lampe de la Providence, l'Eclat de la Vérité, la protection de la Loi, la Balance de la justice, le Sultan de la fidélité, le véritable Matin, le Palmier altier, l'Aurore brillante et l'Étoile étincelante, la Source de la Connaissance d'où jaillit l'eau pure vivifiante, l'Educateur des âmes, le Messager des bonnes nouvelles, le Guide des Nations, l'Annonciateur de Dieu parmi les hommes, le Signe irréfutable, la Bannière la plus élevée, le Joyau des êtres vivants, la Perles de l'existence, la Manifestation de pureté, l'Aurore du Soleil de Sainteté! Impatient de la vie dans ce monde de poussière, il est en dehors des passions et des désirs de l'humanité. Dans les assemblées, on le trouve intoxiqué par le Vin de la louange et de la Glorification du Bien Aimé: dans l'absence comme dans la présence de Dieu, il s'incline et s'agenouille. C'est le solide soutien des fondements divins, la forteresse imprenable de la Religion évidente, le doux Euphrate des assoiffés, le chemin de Salut pour les égarés! De pareils hommes sont des oiseaux reconnaissants dans les jardins de l'Unité, une lumière pleine d'éclat dans l'Assemblée céleste, des Oulémâ divins, les héritiers des prophètes, les perceurs des mystères, les conducteurs des troupes pieuses. Sous leur influence, les lieux retirés propices à la prière deviennent des oratoires du Ciel, et ils considèrent le détachement absolu comme l'unique moyen d'arriver à la Cour de Dieu!

En dehors d'eux, ce sont des corps sans âme, des figures sur un mur. C'est pour de pareils êtres que le Qoran a déclaré: "Dieu l'a égaré par la science."

17

La société a naturellement besoin des liens et de l'ordre indispensables. Car sans ces liens il n'y a ni protection, ni salut, ni sécurité, ni bonheur: la gloire sainte de l'homme n'apparaît pas, et le Bien Aimé du désir ne se dévoile pas: les régions et les contrées ne sont pas cultivées, les villes et les villages ne sont ni civilisés ni ornés, le monde n'est pas organisé et, l'homme ne peu ni progresser ni se développer, les âmes et les consciences ne trouvent ni repos ni tranquillité, la vertu humaine ne découvre pas les lois naturelles, et ne comprend pas la divine sagesse universelle, les sciences glorieuses ne sont pas répandues, les inventions sublimes n'apparaissent pas, ce monde de poussière ne devient pas l'observatoire du ciel, les arts et les progrès n'émerveillent pas les raisons et les pensées, l'orient et l'occident ne peuvent pas se réunir, et le pouvoir de la vapeur ne peut relier entre elles les différentes parties du monde!

Ces liens et cet ordre, qui sont les fondements des monuments de félicité, et les envoyés de la Providence, consistent dans la Religion et dans la Loi civile, toutes deux garantes du bonheur et gardiennes de l'honneur et du salut de la société. Et si tu réfléchis avec attention, et si tu regardes d'un oeil acéré, tu verras que la Religion et la Loi sont des liens nécessaires qui nous viennent de la réalité des choses. Sans elles il n'y aurait point de société, point de tranquillité ni de bonheur humains. Car la société est comme l'individu: l'individu, qui est composé de l'Essence unique et d'éléments différents, opposés et contraires, est naturellement l'objet d'accidents et de maladies. Lorsque d'une indisposition résulte le désordre, un médecin habile, un docteur excellent savent distinguer la maladie, expliquer l'accident, réfléchir aux causes et aux détails de l'indisposition et aux nécessités de la nature. Ils cherchent l'origine, l'effet, la cause, les exigences de la maladie, ils distinguent et reconnaissent les particularités et les généralités. Puis ils pensent à ce qui convient à cette maladie, et à ce qui est nécessaire pour cet accident, et ils donnent leurs soins et leurs remèdes. Il en résulte donc que le remède guérisseur et la prescription souveraine viennent en dernier lieu de l'essence de la nature même, du tempérament et de la maladie.

De même, la société et le monde sont l'objet d'accidents naturels et sont sous l'influence de différentes maladies. La religion, l'ordre, les commandements sont comme le contrepoison suprême et la guérison universelle. un sage peut-il se figurer que tout seul il diagnostiquera une des maladies invétérées de la société, ou comprendra les différents accidents ou indispositions du monde? qu'il pourra distinguer les mystères humains, analyser les souffrances sociales, découvrir les mystères cachés des cycles et des siècles, révéler les liens nécessaires qui viennent des choses elles-mêmes, et établir l'ordre et les règles qui constituent la guérison immédiate et le remède suffisant? Sans aucun doute, c'est absolument impossible!

Il est donc clair et prouvé que celui qui a établi parmi les hommes la Religion, l'Ordre, les Commandements, et les Lois, c'est Dieu. Car nul autre que Dieu ne connaît les réalités de la vie, les détails des êtres animés, les mystères cachés, le secret préservé des cycles et des siècles. C'est pour cela que bien que les lois des pays de l'Europe soient en réalité le produit des pensées de plusieurs milliers d'années de savants jurisconsultes, malgré cela, elles sont encore incomplètes, imparfaites, et constamment en train d'être changées et modifiées, d'être abrogées ou remises au point. Car les anciens sages n'ont pas su voir les inconvénients de certaines lois que les savants modernes ont découverts: ils sont occupés à en rectifier quelques unes, à en approuver ou à en supprimer d'autres.

Retournons à notre sujet: la Religion est l'esprit de la vie, et le gouvernement est comme le pouvoir de salut. La Religion est l'astre brillant, le gouvernement la pluie d'avril; et ces deux étoiles, brillantes comme les deux Farkadan[xxvii] de l'horizon, répandant la lumière sur les peuples de la terre. L'une illumine le monde l'âme, l'autre fait fleurir la terre matérielle. L'une remplit de perles l'océan des consciences, l'autre fait de la surface terrestre un jardin du Paradis. Cette terre devient ainsi l'envie du ciel même: le monde de lumière, jalouse ce globe de ténèbres. Le mage de la miséricorde s'élève et répand la rosée des bienfaits; les brises de la Providence distillent le musc et l'ambre, le zéphyr de l'aurore souffle, le parfum vivifiant réjouissant les coeurs! L'avril divin donne à la terre une fraîcheur nouvelle, le Soleil de Gloire ancienne donne l'éclat superbe à l'horizon du monde, la sombre poussière devient parfumée d'ambre, et les buissons impénétrables sont changés en parterres de roses divines, et en jardins lumineux!

En résumé, ces deux sublimes signes,[xxviii] comme le miel et le lait, semblables à deux faces éthérées, sont l'aide et le secours l'une de l'autre. Donc le mépris de l'un est l'infidélité à l'autre, et l'indifférence à l'obéissance de celui-ci, est l'augmentation de la désobéissance à celui-là.

18

À la religion divine qui est la vie du monde, la lumière manifeste et la conformité du Désir il faut un pouvoir absolu et des moyens efficaces. Il faut aussi un protecteur reconnu, un apôtre inébranlable. Il n'y a aucun doute que, de ce sublime pouvoir, découlent le fondement du gouvernement et la gloire du Royaume. Lorsque l'un sera puissant et victorieux, l'autre sera manifeste et clair; autant celui-ci sera fort et brillant, autant celle-là sera répandue et éclatante. Par conséquent un gouvernement juste est légal, et un État bien organisé est une miséricorde universelle! Le trône royal est environné de l'assistance divine; la couronne royale est ornée des perles de la providence. Dans le Livre évident il est dit clairement: "Dis: Ô mon Dieu, Possesseur du monde, Tu donnes le Royaume à qui Tu veux, et Tu le reprends à qui Tu veux."

Il devient donc évident et clair que ce présent est un bienfait divin et une faveur céleste. De même dans le Hadiss incontesté, il est dit clairement: "Le Sultan est l'ombre de Dieu sur terre." Avec tous ces textes qui sont comme des fondations bien cimentées, quels raisonnements vagues et stupides que ceux qui consistent à parler de tromperie,[xxix] et quelle idée sans fondement ni preuve! Considérez que dans le verset divin et le clair Hadiss,[xxx] c'est une parole absolue, non conditionnelle: c'est une mention générale, non spéciale, qui est rapportée!

De même la dignité des Imams de la Direction, et la condition de ceux qui approchent la Cour céleste, sont la gloire et la pompe spirituelle; et leurs droits sont l'Empire de Dieu. Leur glorieuse couronne est la possession du Chemin de Dieu, leur diadème éclatant, les lumières des Faveurs divines. Leur juste souveraineté s'exerce sur les coeurs, et leur trône exalté et glorieux est le siège véritable du Royaume! Ils sont les souverains du monde de l'âme et du coeur, non de celui de l'eau et de la boue, et les possesseurs du Royaume de l'espace infini, non de l'étroitesse de ce monde. Pour cette station sublime et cette gloire ancienne, il ne peut y avoir ni usurpateur ni pillard! Mais, dans le monde terrestre, leur trône est une simple natte, leur place d'honneur est le dernier rang; le sommet de leur gloire est le dernier degré de la servitude; le palais de leur empire est un coin retiré du monde; les caveaux funéraires sont pour eux des châteaux superbes. La pompe du monde leur est une fatigue insupportable; la richesse et les trésors un mal et un ennui, et le luxe effréné une peine pour leur âme et leur conscience! Dans ce monde de vanité, comme des oiseaux reconnaissants ils sont satisfaits de peu dans le parterre de l'Unité, sur les branches du détachement, occupés à louer et à glorifier Dieu avec des paroles d'une merveilleuse éloquence! En un mot, par le Verset évident et le clair Hadiss, nous voyons que l'État est une faveur du Seigneur glorieux, et le gouvernement une générosité du Maître divin. En résumé, afin de remercier Dieu de cette faveur et de cette grâce Suprêmes, les souverains parfaits et les rois sages doivent être la justice en personne, la sagesse elle-même, la bonté absolue, la bienfaisance manifeste, le Soleil de la Providence, le nuage de la Miséricorde, la Bannière divine, et le Signe du Rahmân!

19

Un gouvernement qui protège ses sujets doit être obéi: et en lui obéissant on s'approche de Dieu. La justice de Dieu exige le respect de droits fondés sur la réciprocité, et la religion divine commande de défendre les situations basées sur la justice. Le sujet a droit à la protection et au respect du gouvernement; l'administré attend de l'administrateur tutelle et bienveillance; le serviteur est sous la garde du roi; le peuple est sous la protection et sous la vigilance des souverains qui marchent dans le droit chemin! Tous les gouvernements sont responsables de leurs sujets. Ils sont pour ceux-ci des forteresses inexpugnables, des grottes sûres. La royauté est un asile imprenable et un refuge élevé, qui protège et garde de toutes ses forces les droits des sujets et des peuples. Elle observe et surveille la gloire et le bonheur des citoyens et des protégés, car les sujets lui sont confiés par Dieu, et les pauvres sont le dépôt de l'Éternel. Aussi, pour les sujets, l'obéissance et la fidélité sont obligatoires: remplir ses devoirs de servitude et de dévouement est commandé. Il est aussi ordonné d'être animé de bonnes intentions et d'être reconnaissant[xxxi] afin d'offrir les impôts de bon coeur, de supporter avec satisfaction les charges annuelles, de s'efforcer d'augmenter l'éclat de la dignité royale, et de se donner corps et âme à la défense de la puissance de l'État et de la gloire du Souverain. Car le résultat de ces obligations et le fruit de cette obéissance reviennent à l'ensemble des sujets. Pour l'obtention de ce grand bonheur et de cette station sublime, chacun des hommes est associé aux autres et a son rôle marqué. Les droits sont réciproques et les devoirs sont fondés sur l'équité. Droits et devoirs sont sous la garde et la protection de Dieu juste!

20

L'État et le gouvernement peuvent se comparer à la tête et au cerveau: le peuple et les sujets aux membres et aux différentes parties du corps. La tête et le cerveau sont le centre des sens et des facultés, le régulateur du corps et des membres: lorsque leur puissance n'est pas contrariée et que leur influence est complète, ils élèvent le drapeau de la protection et se chargent des moyens de défense. Ils organisent les choses nécessaires, facilitent les productions et les résultats utiles. Alors le reste du corps, les membres, reposent dans le berceau de la paix, à extrémité de la tranquillité et dans le plus grand confort! De même que, par l'affaiblissement de leur influence et de leur pouvoir, le royaume du corps est détruit, privé de tranquillité et de sécurité, que mille sortes de dangers l'assaillent, et que le bonheur et la paix de tous les autres membres sont détruits, de même, lorsque le pouvoir du gouvernement est respecté, que ses ordres sont exécutés, le pays prospère et les sujets vivent en paix! Si au contraire son pouvoir est méconnu, les fondements du bonheur et du repos des sujets sont ébranlés et détruits. Car le protecteur, le gardien, le lieu, le chef, le défenseur, le frein nécessaires, se trouvent dans le gouvernement. Lorsque le gouvernement est le pasteur des sujets, et que les sujets accomplissent leurs devoirs civiques, les liens qui les unissent sont solides, les modes de l'attachement sont inébranlables. Lorsque la puissance d'un État et la force de tous ses sujets se trouvent fixées et centralisées en un être vivant, nul doute qu'elles ne se manifestent de la façon la plus évidente. Si l'éclat du soleil tombe au-dessus d'un verre grossissant, la chaleur se concentre entièrement au point médium du cristal et du verre: son influence, sa force, sa chaleur alors seront telles, que n'importe quel corps dur et réfractaire dirigé sur ce point entrera en fusion, pût-il même supporter le feu.

Vois: les sujets de chaque gouvernement bien établi et de chaque empire puissant vivent dans la gloire et le repos le plus complet! Partout ils sont l'objet de la considération et du respect les [plus] grands: sous tous les rapports ils font de rapides progrès, et continuellement ils avancent dans la science, la richesse, le commerce et les arts. Sans le moindre doute ni la moindre hésitation, c'est une chose claire et évidente pour tout sage et tout savant.

21

Ô amis de Dieu, ouvrez les oreilles de l'intelligence, et gardez-vous de causer de l'agitation! Si vous sentez chez quelqu'un du désordre, fût-il un homme important ou un savant sans pareil, sachez qu'il est un imposteur d'entre les hommes, et un adversaire de la Religion du Professeur Possesseur de gloire, un ennemi de Dieu, un destructeur des fondements, un briseur du serment et du pacte, un refusé à la Porte du Miséricordieux! L'homme sage et intelligent, au contraire, est comme une lampe brillante: il est la cause de la prospérité et de la paix des grands et des petits. Selon le serment et le pacte, il lutte toujours pour le bien du monde et le repos des hommes!

Ô amis de Dieu, c'est le temps de la jeunesse de cette religion divine, et la saison du printemps pour cette nouvelle Cause! Ce cycle nouveau, c'est le commencement d'une première croissance, et ce siècle est le siècle choisi par le Dieu Un! L'horizon du monde brille et resplendit par la vertu du Soleil de la Sagesse élevée,[xxxii] et l'orient et l'occident du monde répandent les parfums des saintes brises d'ambre! La face de la création nouvelle resplendit de beauté et de douceur; et le corps de la Cause nouvelle est paré de toute sa puissance et de toute sa fraîcheur! Ouvrez les oreilles et l'intelligence aux conseils et aux recommandations de Dieu, et par la sincérité de vos intentions, le dévouement de votre nature, la pureté de votre caractère, votre attachement au gouvernement, montrez la main blanche;[xxxiii] afin que, dans l'assemblée du monde et la réunion des nations, il soit affirmé et prouvé que vous êtes la lumière brillante de l'humanité, et la Rose du jardin du monde divin! La parole ne donne pas de fruits, et l'arbrisseau de l'espérance ne produit rien; il faut marcher et agir! Avec la volonté tout est possible: tout au plus il y a certaines choses qui sont faciles et d'autres difficiles. Mais où est le mérite? Il faut que l'homme soit par ses actes, le signe de la Miséricorde et la Bannière des Faveurs de Dieu!

Et Paix à celui qui suit la Direction!

22

Dans le jour Al-Fezal,[xxxiv] jour Al-Rahmat[xxxv] du mois Al-Hola,[xxxvi] de l'an Al-Vajeb,[xxxvii] de la 3e Unité[xxxviii] de la Manifestation du Premier Point (que l'âme de tout autre que Lui Lui soit sacrifiée), dans la terre sainte, brillante et blanche nommée Akka, a fini de le copier le Serviteur de Porte de Beha, Muchkineqalam, le mois sacré de Ramazan 1311.

Notes

    [i] Mohammed.

    [ii] Persécution des Behaïs.

    [iii] Le Prophète.

    [iv] Représentés par le gouvernement.

    [v] Des choses mondaines.

    [vi] Kitab-el-Ahd.

    [vii] Extrait du Kitab-el-Ahd.

    [viii] Les souverains justes.

    [ix] Beha Ullah.

    [x] De Turquie.

    [xi] Les Béhaïs.

    [xii] Rom. XIII, 1-2.

    [xiii] Rom. XIII, 4.

    [xiv] en.à.m. montrez la main blanche (allusion au miracle de Moïse).

    [xv] Les Béhaïs.

    [xvi] Dynastie des souverains sofis de 1499 à 1732, détrônée à la suite de l'invasion afghane.

    [xvii] Fondateur de la dynastie Kadjare, monta sur le trône en 1794.

    [xviii] Conquête de Kirman au début du règne de Agha Mohammed Khan.

    [xix] À leur tête était Agha Seyyed Mohammed Isfahani.

    [xx] 1827-1828. Le traité de Tourmanchaï termina la guerre sainte (djehad) contre la Russie que Agha Seyd Moh. Isfahani, à la tête du clergé, avait prêchée.

    [xxi] Cf. Qoran LXIX, 7.

    [xxii] Les plaines de Maghan sont situées au N.E. de Tabriz, et forment la frontière russe du côté de la Mer Caspienne.

    [xxiii] Déposé et assassiné en 1876.

    [xxiv] Cette guerre se termina par le fameux traité de San Stefano le 3 mars 1878, et le traité de Berlin le 13 juillet suivant.

    [xxv] Mohammed.

    [xxvi] Contre les Prophètes.

    [xxvii] Étoiles jumelles de la Petite Ourse.

    [xxviii] La Religion et l'État.

    [xxix] Autrement dit, comment nier que le gouvernement tienne son autorité et son pouvoir de Dieu?

    [xxx] Cités plus haut.

    [xxxi] Envers le gouvernement.

    [xxxii] Beha-Ullah.

    [xxxiii] C.à.d., montrez votre force miraculeuse. Cf. Qoran XXVIII, 32.

    [xxxiv] Jeudi.

    [xxxv] 6e jour.

    [xxxvi] 19e mois.

    [xxxvii] 12 (6+1+3+2).

    [xxxviii] 19 ans.

Back to:   Provisional translations
Home Site Map Forum Links Copyright About Contact
.
. .